Dominique Temple 4 Août1997
Révérends Pères de la Compagnie de Jésus,
Le document que vous avez publié à Mexico le 14 Novembre 1996, «Neoliberalismos en America Latina, Aportes para une reflexión común», invite chacun de vos frères à la réflexion sur le néolibéralisme que vous définissez comme une économie de concurrence délivrée de toute entrave. Vous constatez que la concurrence pure provoque des souffrances irréparables et l'exclusion sociale des plus faibles.
1) La distinction du libéralisme traditionnel et du néolibéralisme est-elle une réponse pertinente à la crise du capitalisme ?
Vous proposez de corriger les iniquités que provoque
cette concurrence, en particulier les inégalités
dans la répartition des revenus et des richesses, et les
inégalités dans la répartition des moyens
de production ou d'échange, grâce à l'intervention
de l'Etat. Vous dites que le néolibéralisme « al oponerse à la intervención
redistributiva del Estado, perpetua la desigualdad socioeconomica
tradicional, y la acrecienta » Lorsque vous ajoutez
: « El neoliberalismo introduce el criterio
de que solamente el mercado posee la virtud de asignar eficientemente
los recursos y fijar a los diversos actores sociales los niveles
de ingresos. Se abandonan asi los esfuerzos por alcanzar la justicia
social mediante una estructura progresiva de impuestos y una asignación
del gasto publico que privilegie a los más desfavorecidos;
y se dejan de lado intentos por la democratización de la
propriedad accionaria o la reforma agraria integral » Souhaitez-vous
que l'Etat s'efforce de réguler au mieux dans l'intérêt
privé de chacun la concurrence et l'échange, et
regrettez-vous que tous les citoyens ne participent pas encore
au système de libre entreprise, que tous ne soient pas
encore intégrés à la machine productive qui
détruit la planète ? Votre ambition de construire
une société plus juste se réduit-elle au
souci d'obtenir l'égalité dans la production et
dans la possession des richesses ?
Ce qui est mis en cause aujourd'hui, c'est la
liberté d'augmenter ses richesses sans limites parce qu'une
telle augmentation conduit à une exploitation de la planète
ni généralisable ni durable.
L'idée qu'au nom de l'égalité on doive permettre
à tout un chacun de participer à la production sans
fin des richesses ne me semble plus d'actualité non parce
que cet égalitarisme ferait injure à quelque autre
principe fondamental tel que la justice (l'égalité
n'est pas nécessairement la justice en particulier quand
l'égalité ne conduit pas à un avantage pour
les plus démunis aussi important que l'avantage que pourrait
leur procurer une organisation qui ferait droit à une certaine
promotion des compétences) mais parce que
le fait de produire toujours davantage de richesses n'est plus
recevable. La thèse d'une régulation dans
la production de valeurs marchandes par l'égalité
des chances ne fait aujourd'hui que masquer sous un principe de
justice l'incompatibilité d'une activité
sans limite avec un monde fini.
Ce n'est pas parce que tous les hommes pourront produire pour
échanger au lieu de quelques privilégiés,
ce n'est pas parce que l'égalité des chances sera
instituée dans une concurrence loyale pour la production
de valeurs marchandes que le rapport entre l'homme et la planète
d'une part et le rapport entre l'homme et l'homme d'autre part
auront changé de nature.
Or, c'est la nature même de ce rapport
qui est en question aujourd'hui parce que la planète ne
peut plus supporter une mise à l'épreuve sans limites
de ses ressources, et parce que l'extension du système
de libre échange se fait dorénavant au détriment
des relations génératrices des valeurs humaines.
La seule possibilité d'une production infinie qui ne mette
pas en péril la planète et le genre humain est celle
de valeurs spirituelles.
2) La participation populaire au libéralisme (ou le capitalisme populaire) est-il souhaitable ?
Votre argumentation soulève une autre question : pourquoi
l'Etat serait-il mis au service de la régulation des intérêts
privés fussent-ils de tous, car vous dites bien que votre
idéal est celui de la propriété actionnariale
c'est-à-dire une forme de propriétarisme généralisé
?
Vous ne défendez pas la même idée de la propriété
que les révolutionnaires de 1789 pour qui le revendication
de la propriété signifiait la libération
du servage. La propriété n'était en effet
reconnue dans l'ancien régime que pour les nobles et les
clercs. Dès lors, quiconque naissait sans propriété
n'était compté que comme meuble de la propriété
d'autrui, il était serf et corvéable à merci.
La revendication de la propriété ne justifiait pas
la propriété pour elle-même mais condamnait
son exclusivité du moment que cette exclusivité
avait pour conséquence la servitude. La revendication de
la propriété pour tous était donc une forme
de liberté. Il serait sans doute erroné de confondre
cette liberté et la propriété elle-même.
Dans la revendication de la propriété, était
dénonçée, avec la servitude, la propriété
elle-même mais sous la forme qui était la sienne
à cette époque : la propriété de
la propriété.
L'accès à la propriété pour les
révolutionnaires signifiait encore autre chose : que l'aliénation
ne portait plus sur la personne mais seulement sur le fruit de
son travail. Le travail pouvait alors être considéré
comme ce que Marx appellera le travail social abstrait. La réduction
au travail social abstrait du travail de l'artisan ou de l'artiste
le privait de la signature irrévocable de son individualité,
mais permettait d'adapter ce travail aux projets d'une entreprise
industrielle.
Ainsi l'aliénation du travail dans le travail salarié
était l'autre face d'un don et d'un renoncement, renoncement
à sa propre autonomie, pour l'immense envol de l'universel
sur les ailes de la colombe. Il y avait du don dans l'aliénation
du travail car l'ouvrier acceptait son exploitation dans l'espoir
que l'entreprise universelle produirait un monde meilleur, et
cette confiance dans l'émancipation par l'industrie des
conditions pénibles du travail archaïque nourrissait
son abnégation. Je dis qu'il y avait du don dans l'universalisme
prolétarien car ce n'était pas pour lui que l'ouvrier
acceptait des conditions inhumaines mais pour l'humanité
à venir.
C'est pourquoi la devise de la révolution française
fut d'abord Propriété Egalité Fraternité
avant de devenir, Liberté Egalité Fraternité,
lorsque la propriété fut utilisée par la
bourgeoisie dans un sens opposé à ce qu'elle signifiait
pour les révolutionnaires.
Or, voici que vous ne défendez pas cette propriété
révolutionnaire qui accompagnait la fraternité universelle,
mais la propriété des actionnaires, le même
type de propriété que la propriété
de la bourgeoisie, de ceux qui enferment la plus-value du travail,
cette part de don adressée à l'humanité par
les travailleurs, dans le profit et la spéculation, c'est-à-dire
dans un capital qui ne s'investit que pour accroître sa
puissance dans l'insolence et le mépris d'autrui.
« Al descuidar la produccion de capital
social el mercado queda al servicio de los más educados,
de los que poseeen la infrestructura y ponen las instituciones
a su servicio, y de los que concentran la información.(...)
De hecho no se ha dado un proceso de incorporación de los
pobres de los sectores populares, y clases medias, en las relaciones
económicas de manera creciente, con capacidades para retener
el valor agregado por ellos para superar la pobreza »
Certes, vous dénoncez que l'Etat soit mis au service du
capital d'une minorité, mais vous le mettez au service
du capital populaire. Vous n'enrayez pas ainsi l'objectif du capital
: le pouvoir. Vous le répartissez différemment.
3) Le pouvoir est-il l'enjeu du politique ?
Le marché devrait être contrôlé,
dites-vous, car « Con la entrada del
neoliberalisme se han accentuado los desajustes que produce en
la sociedad la actuación del mercado que no está
bajo control por la sociedad civil y el estado; » Si
l'on accepte le libéralisme, il faut en corriger les excès,
donc un certain contrôle. Mais alors quelle est la force
que vous appelez le contrôle social ? Où se trouve
le contrôleur de l'initiative et de la responsabilité
de chacun ?
Vous demandez que le pouvoir politique soit démocratique.
Mais la culture et le patrimoine spirituel doivent-ils être
ordonnés et planifiés par ceux qui accèdent
au pouvoir à partir d'une compétition pour la richesse
fut-elle proportionnée et juste ? A la motivation du politique
- le service du bien public -, se substitue aussitôt une
autre motivation : la prétention d'imposer sa marque, son
style, son imaginaire au bien public, et se déchaîne
la compétition pour le pouvoir. Le pouvoir cesse d'être
celui de servir autrui pour devenir celui de dominer autrui.
Vous parez à cette critique en apportant comme solution à la controverse entre ceux qui demandent moins d'Etat pour que les forces du marché puissent établir des conditions objectives pour tous, et ceux qui veulent plus d'Etat pour empêcher que les forces du marché ne fassent injure à des êtres humains, une règle proportionnelle dont la clef est le bien commun : « Contrariamente al pensamiento social de la Iglesia que considere que debe haber tanto Estado cuanto lo requiera el bien común...».
Mais la difficulté n'est que reportée : qu'appelez-vous donc le bien commun ? Je comprends que cette "lumière" est universelle mais aussi qu'elle ne servirait de rien si elle n'animait pas un regard qui ne peut être séparé de celui qui voit par elle. Comment pourrais-je séparer le bien commun du bien de chacun né dans son rapport à l'autre ? Il n'est pas deux personnes qui en donnent la même définition. Doit-on accepter que le bien commun corresponde aux valeurs exprimées dans l'imaginaire de ceux qui les invoquent ? Faut-il s'en remettre aux traditions ou aux mythes ?
L'histoire récente nous montre
combien l'idée de valeurs innées ou acquises est
sujette à caution : vingt siècles de christianisme
en Europe n'ont pas empêché le fascisme ni la Shoah....
4) L'imaginaire du bien commun peut-il tenir lieu de matrice des valeurs humaines ?
Vous exprimez votre idéal du bien commun dans l'imaginaire
de l'Amérique latine ce qui signifie l'impasse sur l'Amérique
indienne, et vous précisez qu'à vos yeux l'avenir
devrait être organisé par cet imaginaire dans l'unité,
comme si l'ethnocide, l'économicide et le génocide
des communautés amérindiennes étaient acquis
et irréversibles : « Al hacer estas
reflexiones es importante mirar a la totalidad del América
Latina y el Caribe Este territorio, de raices culturales y espirituales
comunes, ha sido considerado como un mosaïco de naciones
con destinos distintos. Mirar así las cosas hacía
adelante no es posible. Equilvadria a aferrarnos a un pasado que
se accabó. Todavía no sabemos qué significa
esta unidad latinoaméricana. Pero el proceso acelerado
que conduce hacia allá es vigoroso e irreversible ».
Pourtant, les communautés amérindiennes des Andes
comme celles d'Amazonie, les paysans qui sont de plus en plus
nombreux à s'intéresser aux principes de réciprocité
communautaire, les descendants d'esclaves africains ou asiatiques
qui résistent à l'économie libérale,
et d'autres encore, innombrables, se réfèrent à
d'autres concepts qu'ils expriment parfois dans l'imaginaire chrétien
mais aussi dans d'autres imaginaires que celui dans lequel vous
traduisez votre propre idéal du bien commun, de sorte que
vos options ne sont pas aussi irréversibles que ce que
vous le dites, ou irrévocables.
Loin de se rallier à une pensée unique, beaucoup
s'intéressent davantage à l'altérité
qu'à l'identité, et pensent que l'avenir de l'Amérique
du Sud et de l'Amérique Centrale dont les sources loin
d'être communes sont au contraire différentes, reste
ouvert et pluriel.
Ce n'est pas seulement l'imaginaire latino-américain qui
doit être récusé sous peine de conduire au
despotisme, mais tous les imaginaires dès lors que les
uns ou les autres prétendent les imposer au lieu de les
relativiser par le dialogue. Le bien commun qui n'est pas le produit
d'une telle relativisation par la réciprocité et
le dialogue entre civilisations différentes est totalitarisme.
[Votre vison du futur est fondée sur une conception
de l'histoire qui me paraît erronée «
Este territorio, dites vous, de raices culturales y espirituales
comunes ha sido considerado como un mosaïco de naciones con
destinos distintons »
Vous vous référez ici à une anthropologie
qui tenta de faire accroire que les raisons des sociétés
indiennes et occidentale qui s'affrontent depuis le premier jour
ne différaient entre elles que par leurs représentations.
Vous auriez alors raison d'en appeler de ces imaginaires différents
pour construire des valeurs symboliques communes.
Mais vous supposez (tout comme l'anthropologie que vous critiquez)
des racines culturelles et spirituelles communes entre occidentaux
et amérindiens. Vous niez le fait que les uns ont détruit
les autres par génocide, ethnocide et économicide
et vous faites l'impasse sur la contradiction de systèmes
qui est à l'origine de ces crimes.
L'histoire elle-même exige la résurrection des morts
par la reconnaissance des raisons pour lesquelles des populations
entières ont été anéanties, que les
victimes soient réhabilitées et que cesse l'annihilation
spirituelle des coupables ou la honte de ceux qui héritent
de leur responsabilité.
Or, Vous-mêmes, héritez d'une responsabilité
particulière qui intéresse la contradiction entre
les matrices des valeurs propres aux communautés indigènes
et coloniales : pour avoir assumé le rôle des tubicha
et des paï dans les Réductions guaranies,
les jésuites ne peuvent ignorer en quoi consiste le système
de la réciprocité et plus particulièrement
de la réciprocité des dons.
Vos prédécesseurs ont d'ailleurs traduit dans l'imaginaire
chrétien les valeurs produites par le système de
réciprocité des Guarani, et connaissaient par l'expérience
la contradiction entre leur système de production et celui
que les colons ont imposé par la violence.
Ils n'ignoraient pas que l'antagonisme entre celui qui donne
pour être socialement et celui qui prend pour s'assurer
du pouvoir est mortelle pour celui qui donne. Ce à
quoi se refusent les garants de l'ordre colonial c'est de reconnaître
la déchéance morale de celui qui prend.
Mais cette contradiction n'en demeure pas moins comme une ligne
de partage des eaux entre l'économie occidentale et l'économie
indienne, et de façon plus générale entre
le système de libre échange et tous les systèmes
de réciprocité du monde.
Votre tentative de l'effacer n'est pas seulement une agression
insidieuse à l'égard des peuples indiens mais une
violence mortelle à l'égard des jeunes générations,
qui doivent s'affranchir des limites de l'économie libérale.]
(1)
5) La réponse humaniste du libéralisme au totalitarisme
Cependant, les libéraux eux-mêmes (Jonh Rawls...)
ont défini des principes qui permettent d'éviter
les deux écueils traditionnels du libéralisme :
l'écueil du sacrifice des plus pauvres auquel consentaient
les utilitaristes dans l'intérêt du plus grand nombre
; l'écueil de la lutte sans merci, au nom de la valeur
suprême de la liberté par les libertariens,
au prix de l'égalité.
Le premier principe du nouveau libéralisme tel qu'il a
été formulé par J. Rawls affirme l'égalité
devant les biens fondamentaux, le second le droit à la
différence de chacun pourvu que l'actualisation de celle-ci
ait pour effet principal l'amélioration du sort des plus
faibles. Ordonnée à ce principe de réciprocité
(le souci des plus faibles) la concurrence entre les uns et les
autres devient une émulation au service de l'équité.
Mais pour que ce principe de réciprocité soit le
résultat logique d'un concours d'intérêts
privés, ou d'un simple contrat social, comme le souhaitent
les libéraux, il faut imaginer que les hommes aient le
sens inné de la responsabilité pour autrui, et que
leur intérêt propre se confonde a priori avec celui
de l'humanité entière, qu'ils reçoivent un
tel sentiment de la nature ou qu'ils le reçoivent en héritage
de la tradition et de l'histoire. C'est bien entendu cette dernière
hypothèse que retient le libéralisme. Le libéralisme
se fonde ainsi sur des valeurs, acquises grâce à
un processus historique particulier .
Un tel processus doit-il être imposé
au monde entier ? Faut-il que tous les peuples du monde passent
par le modèle historique de la société occidentale...
N'est-ce pas cette forme de néo-colonialisme que propose
le magistère auquel vous vous référez, et
qui a clairement opté pour le système capitaliste
?
Jean-Paul II, dans Centesimus annus répond à
la question : « Est-ce un modèle
qu'il faut proposer aux peuples du tiers-monde » :
« Si, sous le nom du capitalisme, on désigne un système
économique qui reconnaît le rôle fondamental
et positif de l'entreprise, du marché, de la propriété
privée et de la responsabilié qu'elle implique dans
les moyens de production, de la libre créativité
humaine dans le secteur économique, la réponse est
sûrement positive, même s'il était peut-être
plus approprié de parler d'économie d'entreprise
ou d'économie de marché, ou simplement d'économie
libre. »
Je comprends donc qu'il vous soit difficile de participer à
une autre perspective que celle du capitalisme. Je comprends dès
lors votre distinction entre le néo-libéralisme
et le libéralisme comme un moyen dialectique, que vous
imaginez, pour combattre l'inhumanité du système
capitaliste, bien qu'il soit en réalité impossible
d'établir une contradiction radicale entre le néo-libéralisme
et le libéralisme traditionnel. Je comprends également
le recours à la notion de bien commun, comme le
moyen d'imaginer d'autres motivations aux investissements économiques
que la compétition pour la richesse.
Mais devant les impasses auxquelles conduit tout recours à
la transcendance, impasses qu'illustrent l'intégrisme et
les guerres de religions, ou les génocides, il me semble
plus important de redécouvrir les structures productrices
des valeurs humaines, que de se référer au système
libéral latino-américain même s'il a la force
pour lui, et même s'il est préconisé par le
magistère romain. La force n'est pas l'irréversibilité.
L'irréversibilité même ne crée pas
le droit.
Il est d'ailleurs possible de créer une autre société
que la société capitaliste en se référant
aux origines du christianisme. C'est dire que le dialogue est
possible en lieu et place de la pensée unique.
De nombreuses références aux structures génératrices
des valeurs du peuple juif, sont en effet identiques ou compatibles
avec celles qui fondent l'humanité des peuples amérindiens,
africains ou asiatiques, et suggèrent tout le contraire
de ce que propose votre souverain pontife.
Si l'imaginaire, acquis de la tradition,
révélation, mythe ou histoire, n'est pas recevable,
si le libéralisme parce qu'il réduit la raison à
la raison calculatrice du profit est incapable d'engendrer les
valeurs qui sont le propre de l'homme, ne devient-il pas urgent
de redécouvrir les matrices de l'humanité à
l'origine de toutes les communautés humaines et d'en respecter
les principes ?
Dès lors que les structures de production des valeurs humaines
seraient universellement reconnues, l'imaginaire dans lequel ces
valeurs s'exprimeraient ne serait plus un obstacle à la
compréhension et à la reconnaissance mutuelle, et
le bien commun pourrait être l'oeuvre de l'humanité
entière.
Ne faut-il pas aujourd'hui imposer une limite à l'accumulation
des profits de sorte que chacun, une fois cette limite atteinte,
ne puisse plus accumuler l'information, la connaissance ou les
moyens techniques dans le but de surpasser autrui, mais se sente
au contraire invité à les mettre au service de
l'intérêt d'autrui ?
N'est-il pas temps de reconnaître aux hommes la liberté
de fonder la société sur les structures génératrices
du lien social, n'est-il pas urgent de leur reconnaître
les moyens (l'allocation universelle) de produire pour donner,
ainsi qu'une territorialité autre que celle de la propriété
privée et du libre échange, où puisse se
déployer la réciprocité des dons ?
Note : (1) Le texte entre crochets ne figure pas dans la version
originale.